vendredi 17 décembre 2021

Les enfants de Néocité (Extrait)


 

 


    




Astrée avait choisi ce jour-là, une destination qui ne lui était pas encore autorisée, le complexe-de-vie 17. Elle mourait d'envie de retourner voir la vieille Maya, qu'elle tenait en très haute estime, depuis qu'elle avait obtenu ses précieux conseils par le passé. Ses qualités humaines, doublées de ses talents de visionnaire lui apporteraient peut-être un certain réconfort.

La vieille dame vint l'accueillir sur le seuil de sa porte, souriante et affable, faisant mine comme à chaque fois, d'avoir pressenti sa visite :

— Bonjour à toi jeune Citénienne, ou plutôt devrais-je dire jeune Naturelle. Ton énergie est tellement trouble en ce moment !

— Bonjour Maya ! À vrai dire, oui, je suis un peu troublée.

Maya la précéda et lui proposa un des fauteuils. À portée de main, sur la table basse, une tasse de thé fraîchement versé dégageait son fumet subtilement parfumé de menthe. La vieille dame restait fidèle au souvenir d'Astrée : un mélange d'yeux bleuâtres, de rides malicieuses sur fond de cheveux blancs parfaitement lissés. Astrée garda le silence, ne sachant par quoi commencer. Elle se contentait de sourire à la vieille dame, qui remuait doucement la cuillère dans son thé :

— Eh bien tu as fait du chemin depuis la dernière fois !

— Vous vous souvenez de moi ?

— Bien entendu, je jouis encore d'une excellente mémoire, malgré mon grand âge ! Pourtant, je n'arrive pas à retenir ton prénom, dois-je t'appeler Astrée ou bien Agathe ?

— Appelez-moi comme vous voudrez, moi-même je ne sais plus très bien.

Maya éclata de rire et réfléchit quelques minutes avant de reprendre la parole.

— Je te croyais plus tenace, beaucoup plus tenace que ça !

— Mais...

— Tu ne dois pas te décourager si rapidement ! Tu as choisi un combat difficile, certes, et le succès n'est pas assuré. Mais il n'est pas impossible ! Dans tous les cas, réfléchis bien, les petits ruisseaux font les grandes rivières...

Astrée retrouvait avec délectation le ton à la fois direct et très imagé de Maya, qui lui offrait un spectacle parfaitement à la hauteur de ses attentes.

— Tu ne veux pas de thé ? J'ai un faible pour celui-là. La menthe apaise et réconforte, à tous les coups.

Ces paroles eurent un écho tout à fait positif, et Astrée porta la tasse à ses lèvres pour y goûter. Encore une fois, les paroles de la dame avaient fait mouche.

— Quel délice, et ce parfum !

— Je savais que tu l'apprécierais.

Maya resta silencieuse à nouveau pendant de longues minutes, puis elle reprit finalement:

— Je vois la petite qui a tes yeux. Tu peux être sereine, elle garde le cœur très joyeux ! Elle est bien entourée.

Astrée se sentit presque défaillir, à cette allusion directe à sa petite Jade. Une autre, de ses préoccupations.

— Merci Maya, je suis heureuse de l'entendre.

— Une dernière chose, jeune Agathe, souviens-toi de ceci : la robe rouge du coquelicot, ce n'est qu'une illusion, rien n'est vrai !

— La robe rouge ? Le coquelicot ?

À ces dernières paroles, Astrée resta pour le moins perplexe. Elle prit congé de sa vieille amie en la remerciant chaleureusement. Puis elle tenta de percer le mystère de cette phrase, la tournant et la retournant dans son esprit, mais rien ne faisait sens. Elle-même, n'avait pas de robe rouge et elle ne connaissait personne du nom de coquelicot. Mais qu'est-ce que cela voulait dire ?

 

 

Les Enfants de Néocité Edition BOD - Pages 337-338

mercredi 8 décembre 2021

La Nuit de l'Ange - Romain (Extrait)

 


"Il réfléchit à ce qu'il doit mettre en œuvre pour gagner son cœur indomptable. Quelles stratégies doit-il employer ? Comment correspondre à celui qu'elle attend depuis toujours ? Qui est-elle ? Il réalise qu'il ne sait pas vraiment qui se cache derrière cette jeune femme, quels sont ses goûts, ses espoirs, ses craintes, qu'attend-elle de la vie, quelle petite fille elle était... Il ne sait rien d'elle et il prétend l'aimer ? Il a beaucoup de choses à faire, il a perdu beaucoup trop de temps ! Il doit se remettre à vivre véritablement, sans jouer le rôle du pauvre infirme qui a tout perdu. S'il continue ainsi, il perdra toute chance de gagner la bataille qu'il entreprend. Il doit reprendre les rênes de sa propre existence, et cela commence par reprendre son autonomie, pleine et entière. Il doit aussi se remettre à subvenir à ses besoins en adulte parfaitement indépendant. Il va devoir rompre le cordon ombilical, et cela sera difficile, parce qu'il se sent encore vulnérable. Mais pourquoi serait-il plus vulnérable qu'un autre ? Ce n'est tout de même pas son handicap, qui le rend plus vulnérable ? Il refuse ce constat. « Je ne suis vulnérable que si je fais mienne cette idée, et je m'y refuse ! » Gandalf lui apparaît soudain, souriant, Romain se reconnaît maintenant totalement en lui, comme s'il se voyait dans un miroir, il lui glisse :

— Bravo Romain, tu peux être très fier de toi. Tu as fait un pas énorme aujourd'hui !"

 

Page 129 - Edition brochée BOD