vendredi 30 septembre 2022

Un petit extrait pour vous donner l'eau ... à la bouche !

 


 

 

— Sirène ! Psss !
 
— Oui matrice ?
 
— Pourquoi m'appelles-tu « matrice » ?
 
— Parce-que c'est ce que tu es pour moi, ma matrice !

La Sirène s'était approchée de Jade d'un battement de queue, remuant l'eau et soulevant un voile de vase sur son passage.
 
— D'accord ! avait répondu Jade, mais je préfère que tu m'appelles par mon prénom. Et d'ailleurs, toi aussi je veux te donner un joli prénom. 
 
— Comme tu voudras, Jade. Je te laisse choisir.
 
— Tu peux me faire des suggestions, je t'écoute ? Aurais-tu un prénom en tête ?
 
— Naïa !
 
— Bien évidemment ! Tu as lu dans mon esprit ou quoi ? C'était justement mon idée !
 
Jade eut un choc, elle mit quelques instants à reprendre ses esprits. Naïa, c'était précisément le prénom qu'elle s'apprêtait à lui donner ! Un frisson la parcourut. Elle avait en tête une histoire que sa mère lui lisait lorsqu'elle était enfant, une histoire de sirène qui portait ce prénom-là.
 
— Nous sommes reliées, c'est normal que nous ayons eu la même idée. Tu es ma matrice !
 
— D'accord ! OK. Je vais m'y faire, il faut juste un peu de temps. Naïa, ça te va très bien. C'est agréable d'avoir une amie avec qui parler.
 
— Oui, Jade. De quoi veux-tu que nous discutions ?
 
— J'espère que tu as des choses à m'apprendre, parce-que si tu es simplement une copie de moi-même, nous n'aurons rien à nous dire !
 
Jade éclata de rire, et Naïa l'imita. Elle se posèrent toutes deux, Jade sur le canapé, qui s'était revêtu des couleurs d'un corail jaune vif, Naïa sur le sol vaseux recouvert d'algues brunes enchevêtrées. Jade poursuivit.
 
— Juste pour vérifier, alors, tu sais tout de moi ?
 
— Absolument tout ! Et bien plus encore...
 
— Je suis très intriguée ! D'accord... Mes parents ?
 
— Agathe et Austin.
 
— Oui ! Dis-moi d'où je viens ?
 
— Du village suspendu ! Très loin d'ici sur les terres volcaniques.
 
— Ma sœur ?
 
— Tu as une sœur, qui n'est pas une vraie sœur de sang, Danaé, elle ne te ressemble pas vraiment !    
 
— Exact ! Incroyable ! Dis-moi un secret !
 
— Tu aimes Arès.
 
— Quoi ?
 
— Tu es amoureuse d'Arès.
 
— Mais... enfin ? Pourquoi dis-tu cela ?
 
— Tu me demandes un secret, alors je te réponds !
 
— Bien voyons, Arès ? Moi ? Tu es vraiment très drôle Naïa ! Ah ! Ah ! Ah !
 
— Pourtant, c'est la vérité.
 
— Je sens qu'on va bien s'entendre, oui, on va bien s'amuser toutes les deux ! 
 

 Pages 49 - 50 de la version papier.

lundi 19 septembre 2022

Ma chronique sur le roman de Rose Héléa "Le vide de leurs entrailles" Tome 1

 

 

Un livre plein de vie....

Je referme doucement « Le vide de leurs entrailles », Tome 1, un roman poignant de Rose Héléa Auteure. Je vous l’avoue, j’avais une appréhension à le lire, parce que le sujet résonne en moi douloureusement. Je fais partie de ces « ventres vides » et j'ai connu aussi, bien que dans une moindre mesure, la torture mentale et les contraintes physiques de la PMA. Mais je m’arrête là, car il ne s’agit pas de moi ici. Parlons plutôt de ce magnifique roman qui fait écho à de trop nombreux parcours de vies, rendus éprouvants par les éprouvettes !

Tout d’abord, la couverture est juste sublime, d’une beauté épurée, simple et poétique. La lune évoque le ventre rebondi tant désiré, le Saint Graal, la vie ! Mais le titre est un cri qui nous dévoile déjà la teneur du roman : le cri de de l’agonie, celui de la lente descente aux enfers.

 C’est d’abord un roman sur le désir, le désir ardent des femmes et des hommes à procréer. Vouloir un enfant est tellement « naturel ». C’est le désir le plus partagé de toute l’humanité, me semble-t-il, couplé à celui d’être heureux. Mais le bonheur, ou l’idée du bonheur, n’est-elle pas souvent liée à ce désir d’enfant qui nous prend aux tripes, sans véritablement savoir d’où il nous vient ? Besoin primaire de survie de l’espèce ? Volonté de se prolonger grâce à une descendance et de faire un pied de nez à notre mortalité ? Ou nécessité impérieuse de leur déverser notre trop plein d’amour inconditionnel ?

 Puis, lorsque l’enfant tant désiré ne paraît pas, quel drame ! Quelle immonde injustice, ressentie comme une cuisante souffrance. Or la chose la plus simple, la plus naturelle qui soit… devient une réelle épreuve pour les couples. Ce roman raconte très méticuleusement le parcours atypique d’un couple en PMA. Toutefois le roman, et c’est une bonne surprise,  évite l’écueil du pathos, la noirceur et la déprime, car Marie est une héroïne pétillante, solaire et pleine de vie. Dès le début, elle nous touche par son sens de la dérision, son intelligence, ses avis très tranchés sur d’innombrables sujets. Sa vie part en vrille dans un contexte social oppressant, et malgré tout, elle s’accroche à l’espoir, tenace comme un bernique sur son rocher.

C’est aussi et avant tout une histoire d’amour extraordinaire. Quand d’autres couples auraient sombré dès les premiers échecs…Jo et Marie c’est du solide, une union inébranlable, contre vents et marées. Même si elle vacille dans la tempête, leur embarcation tient le cap.

 Le style de l’auteure est délicieux, j’ai adoré les dialogues, très nombreux, très denses et d’une richesse sophistiquée. Je me suis retrouvée dans un film de Woody Allen, avec ses joutes verbales et ses digressions étudiées sur une société moderne sclérosée.. Un roman qui vous prend aux tripes !

 

L’histoire :

 

Notre coquine de cigogne a dû boire un mojito de trop et déposer notre bébé dans un champ de patates et pas dans un chou !
Passionnée et épicurienne, Marie forme avec Jo un couple joyeux. Ils s’aiment et rêvent d’une farandole d’enfants.

Après des années de procréation médicalement assistée, Marie traite la cigogne d’ivrogne. Arrivera-t-elle à concevoir l'extraordinaire ? Son couple survivra-t-il à cette épreuve ?

Avec sa galerie de personnages attachants, cette quête pour combler le vide scanne notre société, questionnant l’amour et l’amitié.

Le récit de la naissance du Mouvement du Vrai Peuple, dont le Président s’arroge un pouvoir croissant en s’appuyant sur la peur des microbes et l’urgence écologique, donne à ce roman un ton terriblement actuel.

Une héroïne forte et fragile. Ordinaire et extraordinaire. Un combat singulier et pourtant universel. Celui d’une mère. Une peinture saisissante de notre société et de ses dérives.

Quand on n’a que l'amour est le premier tome de la saga Le vide de leurs entrailles. Il sera suivi du tome 2 Avec le temps, va, tout s'en va

Le vide de leurs entrailles est une saga relatant non seulement la quête d’un couple, mais également les soubresauts d’un monde en décomposition. C’est une dystopie pleine de rebondissements interrogeant la maternité, le deuil, mais aussi la démocratie à l’heure de l’urgence écologique, du terrorisme et des épidémies.